Il est le capitaine de la 1re équipe: Wayan Ducommun à coeur ouvert

Wayan Ducommun, vaillant capitaine et locomotive de notre 1re équipe. (Photo Alain Boillat)

S’il en est un, au sein de la 1re équipe, qui peut se targuer de posséder l’ADN du FC Tavannes/Tramelan, c’est bien le capitaine Wayan Ducommun. Non seulement parce que ce Tramelot de 25 ans est un excellent footballeur doublé d’un garçon intelligent, poli et bien élevé, mais aussi parce qu’il s’y entend pour transmettre, via son tempérament de battant et sa mentalité de gagneur, des émotions fortes. «Wayan est un joueur que n’importe quel entraîneur aimerait avoir dans son équipe», complimente le coach Philippe Rossinelli. «C’est un leader naturel qui exerce sur les autres une influence énorme, car il montre l’exemple aussi bien aux entraînements que dans les matches.»

Philippe apprécie la façon de se comporter de celui en qui il accorde une totale confiance (réd: Wayan n’a pas raté une seule minute de championnat jusqu’ici et, preuve de sa remarquable implication, a tenu à jouer ce samedi 28 octobre contre Liestal malgré une vilaine blessure récoltée une semaine plus tôt à Bubendorf). «Je le trouve très bon dans les duels», dit-il, «fort de la tête, surtout défensivement, doué techniquement aussi, car le ballon est son ami malgré sa taille (réd: lm91). Tactiquement, il privilégie son replacement défensif et se sacrifie dans des tâches obscures au profit de ses coéquipiers.»

Il y a ce constat, enfin, de la part du technicien delémontain: «Wayan est quelqu’un de sensible qui est très exigeant avec lui-même. Parfois, cet état d’esprit lui fait perdre une partie de ses moyens lorsqu’il rate un geste facile et qu’il s’en veut énormément…»

Alors Wayan, tu confirmes cette dernière remarque de l’entraîneur?

Tout à fait. Son analyse est pertinente. Dans la vie de tous les jours également, j’ai tendance à mettre la barre trop haut, alors que je sais pourtant qu’on ne peut pas atteindre sans cesse des sommets.

Il paraît que tu as besoin d’un certain temps pour digérer une défaite…

C’est vrai. Je suis un mauvais perdant dans l’âme. Ou plutôt, dès qu’il y a de l’enjeu, un gagneur! Le lundi matin, il m’est pénible parfois de répondre aux questions et aux remarques de mes collègues de travail. Ils savent quand il faut m’adresser la parole ou non… En mon for intérieur, j’ai seulement besoin de quelques heures pour accepter un échec. Ensuite, je le considère comme une source de motivation supplémentaire pour le prochain entraînement.

On l’a vu plus haut, Philippe te tient en haute estime. Est-ce réciproque?

Oui. J’aime son attitude positive, son habitude d’adresser de nombreux compliments. Il a la faculté de bien cerner le profil et la personnalité des joueurs et sait trouver les bons mots au juste moment. Et quand il pique, c’est de façon constructive. S’il y a des choses à dire ou à remettre en place, il n’hésite pas à le faire de manière franche et directe. Pendant les matches, il lui arrive d’élever la voix, mais je ne vois là rien d’anormal. C’est le rôle de l’entraîneur.

Philippe va bientôt fêter ses 70 ans. Ses méthodes d’entraînement ne sont-elles pas un brin désuètes?

Pas du tout. C’est même tout le contraire. Avec lui, les séances de travail sont courtes, intensives, ludiques et méthodiques. Pour moi, franchement, c’est une belle découverte. On voit que Philippe en connaît un bout sur la question. Par exemple, il nous corrige et nous apporte une plus-value sur des trucs d’apparence anodine.

Comment as-tu vécu en juin dernier le départ de Steve Langel, le prédécesseur de Philippe, toi qui as œuvré de nombreuses années sous ses ordres?

J’ai considéré cette séparation comme la fin d’un cycle. La page s’est tournée de manière abrupte, c’est vrai, mais cela n’enlève rien aux immenses mérites de Steve. Ce qu’il a fait pour le FCTT, c’est tout simplement énorme! Le club lui doit le respect. Je le lui dois aussi à titre personnel, car c’est lui qui m’a amené à ce niveau. Nous avons toujours entretenu de bonnes relations. Entre nous, il n’y a jamais eu d’animosité.

Cet été, le FCTT a connu de gros problèmes en entame de championnat. Ça t’a miné?

Forcément. C’était paradoxal, puisqu’avec quatre points en deux matches nous n’avions jamais si bien commencé! Le tournant s’est peut-être situé lors de la 3e journée, quand nous avons perdu 2-1 à Ueberstorf, de manière tout à fait évitable. La longue série de défaites qui a suivi nous a fait beaucoup de mal. Heureusement, le moral de l’équipe n’en a pas été affecté. Tout le monde a gardé le sourire et nous étions toujours plus de 20 à l’entraînement! Alors oui, nous avons traversé une période délicate, mais nous avons les armes qu’il faut pour nous en sortir.

Le maintien en 2e ligue inter est-il dans vos cordes? Et est-il vraiment nécessaire pour le club?

Quand on voit que l’on est capable de rivaliser avec un gros calibre du genre de Besa, puis de battre Bubendorf et Liestal, je pense que le maintien est chose possible, oui. L’équipe a assez de qualités pour éviter la culbute. Il lui manquait juste un déclic pour reprendre confiance et trouver davantage de stabilité. Elle a subi de nombreuses mutations et beaucoup perdu en expérience, ne l’oublions pas. Il lui a donc fallu du temps pour trouver la bonne cohésion. Que le FCTT s’assure un avenir à long terme en 2e ligue inter, ce serait top, évidemment. Mais le niveau et les exigences de cette catégorie de jeu deviennent toujours plus difficiles à atteindre pour un club comme le nôtre, qui ne possède pas, contrairement à beaucoup d’autres, un noyau de joueurs expérimentés venus des ligues supérieures. Cela étant, le «fait maison», qui est notre fonds de commerce, a souvent payé par le passé, nous avons même réussi parfois des choses exceptionnelles. Je reste donc optimiste.

Il convient tout de même d’évoquer le scénario du pire. L’équipe risquerait-elle d’être démantelée, selon toi, en cas de relégation en 2e ligue?

Je n’ai pas trop envie de parler de ce sujet… (Il réfléchit)… Mais non, étant donné que le groupe est sain et cultive un esprit fraternel, je pense qu’il n’y aurait pas à craindre une saignée.

Toi, tu te verrais jouer en 2e ligue?

En tout cas, je ne le vivrais pas comme une honte, je serais le premier à me battre dès mon entrée sur le terrain.

Tu vises pourtant plus haut. Cet été, tu as beaucoup hésité à t’engager à Courtételle, en 1re ligue. Autrement dit, le «train» FCTT aurait pu se retrouver sans sa locomotive…

Oui, j’ai failli craquer. L’attrait était évident. Pas financièrement, car je ne joue pas au foot pour l’argent, ce n’est pas vital. Mais sur le plan sportif. J’ai toujours rêvé de jouer à un niveau supérieur. Du coup, j’aurais pu voir ce transfert comme la récompense de tous les efforts entrepris pendant de longues années. En outre, je connais bien plusieurs joueurs de Courtételle, comme les frères Ducommun par exemple (réd: aucun lien de parenté avec Wayan), et j’aurais pu revendiquer une place de titulaire en ligne de médiane, un secteur de jeu plutôt dégarni au moment de nos pourparlers.

Et pourtant, tu as fini par décliner…

Eh bien oui, j’ai fait la part des choses. D’une part, l’offre de Courtételle est arrivée tardivement. Le timing était très mauvais. De l’autre, il se trouve que le FCTT me confie un rôle important qui me satisfait et me permet de m’épanouir. Par ailleurs, le discours de Philippe, qui m’a fait comprendre qu’il comptait sur moi, m’a plu. J’ai eu envie d’y adhérer.

Blaise, ton directeur sportif de père, et Donovan, ton coéquipier de frangin, ont sûrement cherché à te dissuader de partir…

Absolument pas. Au contraire, vu en tout cas sous l’angle purement familial, ils auraient compris et approuvé ce choix, l’auraient jugé comme quelque chose de mérité.

Le FC Courtételle risque de revenir à la charge en juin 2024, non?

Je n’en sais rien. Si l’opportunité d’aller voir plus haut se présente à moi, pourquoi pas? Mais bon, il est délicat et prématuré de déjà nous plonger dans la saison prochaine. En ces temps difficiles, je me place au second plan et me soucie avant tout du bien de l’équipe et du club.

En remplacement de Sergio Cunha, tu as hérité du brassard de capitaine. Ressens-tu une pression supplémentaire?

Non, mon attitude est la même. Depuis que je suis devenu titulaire, j’ai toujours tenu un rôle de leader dans cette équipe, et ça me plaît. C’est le poste clef que j’occupe qui veut ça. Si tu ne parles pas en tant que milieu défensif, t’es mort! La différence, aujourd’hui, c’est que je me dois de rester constamment positif, de ne pas afficher mes états d’âme. C’est sûrement un bien tant pour le groupe que pour moi. L’image du Wayan râleur est révolue.

Pendant la crise du Covid, tu as beaucoup maigri. Au prix de quel effort?

Pesant alors 96 kg, j’ai fini par prendre conscience que cette surcharge pondérale nuisait à mon rendement sportif. Alors j’ai décidé de profiter de l’arrêt forcé de la compétition pour m’attaquer au problème. Du coup, j’ai fait beaucoup de course à pied, de squash et de renforcement musculaire. Et j’ai opté pour une alimentation plus saine, plus équilibrée. J’ai évacué une douzaine de kg et mesure aujourd’hui la différence. Je me sens et joue mieux.

C’est bizarre, cette saison, tu sembles être devenu doux comme un agneau. Après 12 matches, tu n’as reçu que trois avertissements, toi l’abonné aux cartons jaunes. Que se passe-t-il?

Je me suis fait avertir 11 fois tant en 2021/22 qu’en 2022/23 et j’ai subi des suspensions qui ont pénalisé l’équipe. Donc j’ai décidé de travailler sur moi pour m’améliorer, tout en continuant cependant à m’engager à fond. Mais cette question ne m’obsède pas dès l’instant où j’entre sur un terrain. Cela dit, je ne me priverai pas, si nécessaire pour le bien collectif, de commettre une faute «intelligente».

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Wayan Ducommun en quelques traits

Célibataire mais «en de bonnes mains», Wayan Ducommun, formé à l’origine comme employé de commerce, gagne sa vie depuis quatre ans dans l’entreprise TG Mécanique, à Saignelégier, dans le secteur du contrôle de qualité. Le foot étant un hobby contagieux au sein de sa famille, on peut dire qu’il est tombé dans la marmite dès sa plus tendre enfance. «Je suis tellement passionné que je suis capable de regarder jusqu’à une dizaine de matches par semaine à la télé», affirme-t-il. «Et il n’est pas rare de me rencontrer dans des stades de la région, à Delémont, Bienne ou Bassecourt. Mais je m’intéresse aussi au sport en général. A mes heures perdues, je suis un adepte de la marche dans la nature, tout comme mes parents d’ailleurs, et pratique la course à pied, car j’apprécie l’idée du dépassement de soi, de se mettre dans le rouge.»

Wayan – prénom que ses parents Magali et Blaise ont «ramené» de leur lune de miel à Bali – a passé toute sa carrière de joueur au FCTT, abstraction faite d’une parenthèse de trois ans au Team Jura. «En M12 avec Vincent Ducommun, puis en M13 avec Alexandre Wicht, j’avais une place de titulaire», se souvient-il. «En M14, les choses se sont en revanche mal passées. Je n’entrais pas dans les plans de l’entraîneur Francis Stadelmann et recevais peu de temps de jeu. D’entente avec mes parents, auxquels soit dit en passant je voue une grande reconnaissance pour m’avoir conduit à Delémont quatre fois par semaine pendant tout ce temps, nous avons choisi d’abréger l’expérience après six mois. Pour moi, une déception. Comme tous les ados de cet âge, j’avais envie de grandeur, d’une carrière au plus haut niveau, même si j’étais conscient que cela risquait d’être compliqué…»

Revenu dans son club de cœur, Wayan fut convoqué pour la première fois en équipe fanion par le coach Eric Tellenbach à l’âge de 17 ans. C’était en 2015. Depuis lors, il s’est fait peu à peu une place au soleil, au point de devenir un rouage essentiel. Au compteur, il affiche un total de 120 matches de 2e ligue inter et 11 de Coupe de Suisse, presque toujours comme milieu récupérateur ou défenseur central. «J’apprécie les deux postes», dit-il, «mais encore davantage celui de demi. C’est là me semble-t-il que je suis en mesure d’avoir mon meilleur rendement.»

Le porteur du maillot No 6 connaît ses points forts, qu’il évoque toutefois sans se prendre la tête. «On peut citer mon jeu aérien, surtout défensif, ma qualité de passes, au sol comme sur les longues balles, et ma grinta dans les duels», résume-t-il. «A mes yeux, un tacle réussi vaut autant qu’un but! J’adore le fighting spirit des Anglais, leur façon de se lancer à fond la gomme dans les duels.»

Wayan est conscient également de ses points faibles. «Il s’agit avant tout d’un manque d’explosivité et de vitesse, ce qui me porte préjudice surtout quand j’affronte de petits gabarits», sourit-il du haut de son 1m91. «Sinon, je ne marque pas assez de buts à mon goût et, comme le dit le coach, je suis un peu trop exigeant avec moi-même. Mais j’y travaille…»

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