Voici une vingtaine d’années, déjà, que ce passionné de football – double national italien et suisse – est établi à Tavannes. Jamais pourtant, avant l’été 2023, cet enfant de Sonceboz âgé aujourd’hui de 44 ans n’avait œuvré pour le compte du FCTT. Ni comme joueur, ni comme entraîneur. Ses pérégrinations footballistiques l’avaient mené un peu partout ailleurs dans le Jura bernois et sur les hauteurs biennoises (voir ci-dessous), mais pas dans le club de son village d’adoption, alors qu’il entretient pourtant d’amicales relations avec bon nombre de ses représentants.
Cet «impair» est désormais réparé. Depuis juillet dernier, Michele Merlino dirige notre équipe de juniors B 1er degré. Une mission délicate pour ce titulaire du diplôme C+, en raison principalement d’une pénurie de personnel. L’automne dernier, ses ouailles ont sauvé in extremis leur place dans leur catégorie de jeu, le 1er degré donc, avec leur 8e place finale et 13 points récoltés en 11 matches. Ce printemps, une grosse bagarre contre la relégation se dessine à nouveau (voir le classement actuel sur le site de l’AFBJ). Eviter la culbute à tout prix, tel est l’objectif fixé par les dirigeants de notre mouvement juniors (MOJU).
Michele, décris-nous dans les grandes lignes les particularités de ton équipe…
Humainement, c’est la grande classe. Nous avons affaire à des garçons polis. En revanche, le constat est beaucoup plus mitigé pour ce qui est de l’aspect sportif proprement dit. Nos résultats ne reflètent pas le temps et le travail investis durant les entraînements.
Comment l’expliques-tu?
L’effectif est beaucoup trop mince. Comme il est trop mince également chez les juniors A et les juniors B 2e degré. Du coup, pour combler les trous, les entraîneurs n’en finissent pas de jongler d’un match à l’autre en devant s’échanger des joueurs. Chez nous, la situation s’est encore aggravée avec l’indisponibilité prolongée de plusieurs blessés graves. Là, en ce mois de mai, j’ai seulement 13 gars «utilisables» sous la main. Or, chacun sait qu’il faudrait davantage de concurrence pour élever le niveau général, les joueurs étant plus ou moins assurés de leur place de titulaire.
Qu’est-ce qui est si gênant?
Avec si peu de monde, il est pratiquement impossible à l’entraînement de mettre en place des exercices collectifs spécifiques. Alors on bricole et, à force, la situation devient pesante. Elle l’est d’autant plus que, au départ, cette équipe, ou du moins deux tiers environ de ses membres, nourrit une réelle ambition sportive.
Et les autres?
Les autres pratiquent le football avant tout pour être avec les copains, ce n’est pas leur préoccupation majeure. C’est aussi le cas par exemple chez la plupart des juniors B 2e degré. Attention: dans mon optique, ce constat n’a rien de péjoratif. Je suis conscient de l’importance du rôle social d’une équipe dans nos villages. A ce stade, il faut peut-être préciser que toutes les difficultés auxquelles je fais allusion, nous ne sommes pas les seuls à les rencontrer. La grande majorité des clubs de la région sont logés à la même enseigne.
Vous vous entraînez à quelle fréquence ?
Trois fois par semaine, deux fois à Tramelan et une fois à Tavannes. Nous travaillons uniquement avec le ballon, il ne faut dégoûter personne. Je n’ai pas le droit de perdre quelqu’un en cours de route…. Depuis la reprise après la pause d’hiver, j’ai un nouvel assistant à mes côtés en la personne de Flavio Bernasconi. Il a remplacé Rafael Machado, qui a dû se retirer pour des motifs professionnels. Thierry Chappatte nous donne également un coup de main. Il connaît chaque junior du FCTT sur le bout des doigts et ses conseils nous sont précieux.
Au fait, qu’est-ce qui t’a motivé à devenir entraîneur?
Depuis longtemps, comme joueur, j’avais pris l’habitude d’analyser les données d’un match. Le job d’entraîneur m’a toujours attiré, je n’ai fait que suivre une voie qui me semblait naturelle.
Il en faut du caractère pour diriger une équipe…
C’est vrai. Tout est très carré chez moi. J’ai un langage direct. Forcément, ça ne plaît pas à tout le monde. Mais cela m’évite au moins de passer pour un faux c…
Pour toi, tout a commencé sur un banc à Moutier-Court…
En effet, sur l’insistance de Michael Ren, un pote à moi, j’ai fait mes premiers pas d’entraîneur et fêté deux promotions avec les juniors B de ce groupement. Ensuite, j’ai passé un an et demi avec des adultes à Belprahon, en 3e ligue. Une expérience positive sur le plan humain avec de bons gars, c’est un fait. Mais le foot ne se limite pas à ça.
En 2021, tu deviens l’assistant de Frédéric Burger au sein de la 1re équipe du FC Moutier, en 2e ligue inter. Raconte-nous…
Nous avons vécu une saison pénible. Fred n’a pas résisté aux critiques et est parti en cours de route. Après ça, je me suis retrouvé un temps seul sur le banc. Par respect pour le club, il n’était pas question pour moi de quitter le navire, qui a tout de même coulé. Puis Walter Dos Reis est arrivé, mais nous ne sommes pas parvenus à éviter la relégation. Notre duo a pourtant été reconduit pour l’exercice suivant, en 2e ligue, où nous avons obtenu des résultats moyens. Dès le mois de mars 2023, j’ai annoncé aux dirigeants prévôtois ma décision de m’en aller au terme de la saison. Walter, lui, n’a pas été prolongé, et l’a ressenti comme une défaite personnelle.
Te voici au FCTT. Quelle comparaison peut-on faire entre les deux clubs?
Comme chacun sait, ils ne sont pas du tout gérés de la même manière. La différence de mentalités est énorme. De bons potes à moi m’avaient vanté pendant des heures les mérites de la politique du FCTT. Pour moi, il est enrichissant de découvrir autre chose.
Ton avenir est-il déjà défini?
Non, pas encore.
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Le foot le dispute au patinage artistique
Né le 6 février 1980, Michele Merlino, dont les origines se situent dans le Basilicate, en Italie méridionale, a passé toute son enfance à Sonceboz. Il possède les deux passeports. Aujourd’hui, cela fait une vingtaine d’années qu’il réside à Tavannes. Il a fondé une famille en épousant Angela, une Italienne de Moutier, qui lui a donné deux filles, Mina et Enza. Toutes trois adorent aussi le football, mais leur véritable passion, c’est le patinage artistique. La maman est d’ailleurs tellement investie qu’elle exerce la présidence du CP Tramelan, tandis que les deux filles pratiquent ce sport avec assiduité et talent.
A sa sortie d’école, Michele fait un apprentissage de mécano au garage Burkhalter, à Tavannes, mais se reconvertit ensuite pour devenir responsable des ventes pour la Suisse romande et de la formation continue de tous les vendeurs chez Suhner SA, une entreprise familiale plus que centenaire établie à Lupfig, dans le canton d’Argovie. «Suhner, qui produit des machines électriques et pneumatiques à main et vend des solutions pour l’industrie métallurgique, alimentaire et pharmaceutique, emploie environ 200 personnes en Suisse et plus de 1000 à travers le monde. J’ai la chance de pratiquer le plus beau métier du monde, de faire ce que j’adore, rencontrer du monde. Je suis de nature très extravertie!», s’enflamme-t-il.
Et au rayon football? Michele est un supporter fou (il le dit lui-même) du SSC Napoli. En 2023, il a d’ailleurs assisté sur place et en famille au sacre national de son club de cœur. Un événement mémorable après 33 ans d’abstinence!
Comme joueur, il a entamé son cursus à Sonceboz. «Je me suis lancé tardivement, à cause de graves problèmes de santé», explique-t-il. Il a ensuite écumé de nombreux clubs de la région, toujours au poste de latéral gauche: La Suze, La Heutte, Bévilard-Malleray, Evilard, Reconvilier et Court. «C’est à Evilard que j’ai connu ma plus belle période», précise-t-il. Pour conclure, il lâche cet aveu: «Je n’ai jamais été un grand footballeur. Mais je pense être un meilleur entraîneur…»