Par son charme désuet, elle intrigue. Même, elle a de quoi séduire les âmes romantiques. Mais elle peut agacer aussi par le relatif inconfort de ses places assises et par la vision imparfaite qu’elle offre à certains endroits, due à la présence peu opportune de six (!) poteaux de soutien. Elle, c’est la tribune de l’Allianz Suisse Stadium. A l’heure où notre club s’apprête à célébrer, en 2026, le 25e anniversaire de sa fondation, le vénérable édifice tramelot des Lovières, lui, vient de fêter ses trois quarts de siècle d’existence. Il a été porté sur les fonts baptismaux en 1950.
Dans la longue série que nous consacrons cette saison à l’anniversaire du FCTT, nous avons décidé, sur proposition de notre estimé vice-président et secrétaire Vincent Tanner, de nous payer une brève incartade un peu hors sujet pour évoquer – dans les grandes lignes – quelques anecdotes liées à la construction de ce bâtiment unique en son genre. Les plans et autres procès-verbaux, nous avons pu les consulter grâce à l’aimable concours de l’ex-archiviste municipal Alain Droz.
Cela fait fort longtemps déjà que ce Tramelot pur sucre de 82 ans a reçu pour mission de réunir, de trier, de soigneusement répertorier, puis de classer tous les documents écrits ayant trait à la vie du village. Un travail de très longue haleine, qui lui a pris… 13 ans! Un local idoine est affecté à cet effet dans les sous-sols de l’Hôtel de Ville.
«A mes yeux, rien n’est obsolète», lance Alain Droz, nota bene un ancien hockeyeur du HC Le Fuet-Bellelay. «La mémoire du village, c’est sacré. Il me paraissait donc essentiel de mettre tout ce qui touche à l’esprit d’ici à l’abri des outrages du temps. Cela n’avait été fait qu’imparfaitement avant que je prenne les choses en mains. Tout était alors en vrac, ficelé et amassé dans des cartons, et cela dans des conditions de conservation insalubres. Là, maintenant, j’ai tout classé dans des armoires et suis en mesure de retrouver en deux temps et trois mouvements les documents ayant trait aux relations entre les autorités communales et les sociétés et clubs locaux. Pour ne citer que cet exemple…»
Projet long à devenir réalité
Quelle fut la genèse de ce vaste projet, dont l’idée germa plusieurs années auparavant, à savoir durant la Seconde Guerre mondiale? Le livret de fête édité à l’occasion de l’inauguration de 1950 révèle le secret. «Ensuite d’une ordonnance encourageant le développement de la gymnastique et des sports», narre son auteur, le dénommé Maxime Vuilleumier, «un groupe de citoyens des deux Tramelan envisagea en 1942-43 la création d’une nouvelle place de sports, d’une tribune et de vestiaires dans notre localité. L’initiative de cette riche idée est revenue à M. Léon Gindrat, président de la commission d’école primaire de Tramelan-Dessus, lequel prit plus tard la direction de la commission de construction.»
L’étude et la concrétisation de ce projet s’étendirent sur de longues années. A ce stade du récit, il y a lieu de préciser que la nouvelle place de sports n’était pas réservée à l’origine qu’au seul football. Loin de là, même. La gymnastique, l’athlétisme, le handball, la balle à la corbeille et les leçons de sport scolaires y avaient également «droit de cité».
Comme bien on l’imagine, entre séances diverses, demandes de subventions et d’autorisations, entre récoltes de fonds publics et privés et établissement des plans par l’architecte Maxime Chapatte, il fallut surmonter d’innombrables obstacles. Les premiers coups de pioche purent être donnés à l’automne 1947. Les travaux de nivellement du terrain et de la construction de la tribune furent confiés à diverses entreprises de la localité, lesquelles purent compter sur l’appui des membres du FC Tramelan et des «garçons des écoles» les plus âgés.
Mais la construction de la tribune eut à subir d’importants retards. Raison invoquée: le manque de main d’œuvre. Heureusement, tout finit par s’arranger au début de l’année 1950, et cela quand bien même le devis initial fut dépassé. Explication fournie par le livret de fête susmentionné: «Les montants qui supportent le toit sont en béton armé, alors qu’ils étaient prévus en bois. Cette amélioration, bien que coûteuse, permet de supporter une charge de 400 kg de neige et de 400 kg de vent par mètre carré. La sécurité des spectateurs est donc assurée. Cette tribune offre une contenance de 320 places assises.»
Coût total de la construction de l’édifice: 97’643 francs. On vous laisse imaginer le prix d’érection d’un tel bâtiment par les temps qui courent… Soit dit en passant, la très dense cérémonie d’inauguration des 24 et 25 juin 1950 laissa un bénéfice de 2’200 francs, pour des recettes globales de 5’700 francs.
Sochaux trop cher
Chargés de mettre sur pied le volet footballistique de cette cérémonie d’inauguration, les dirigeants du FC Tramelan eurent mille peines à réunir – à des conditions financières acceptables – deux équipes de renom pour disputer le match de gala prévu. Par exemple, pour un engagement de l’autre côté de la frontière, le club français de Sochaux exigeait un montant forfaitaire de 3’000 francs suisses, somme jugée largement excessive par les organisateurs. En fin de compte, ces derniers trouvèrent un arrangement avec le grand FC La Chaux-de-Fonds (LNA) de l’époque, auquel ils opposèrent une sélection tramelote renforcée par quatre joueurs du FC Bienne. Au terme d’une rencontre spectaculaire, les «Meuqueux» s’imposèrent par 4-3.
Pour assister à cette partie en tant qu’adulte, il fallait débourser 1,5 franc. Et rajouter 50 centimes pour prendre place dans la nouvelle tribune…
Bâtiment digne de conservation
A noter pour conclure ce point important: en 2001, la tribune du stade tramelot a été jugée digne de conservation par le Service des monuments historiques du canton de Berne. Toute mesure de réaménagement ou de rénovation doit donc être soumise à l’approbation de cette autorité officielle.

La page de couverture du livret de fête publié lors de l’inauguration de 1950.

