En ce mois d’août, le FCTT inaugure une nouvelle série qui, jusqu’en juin 2026, sera intégralement consacrée à l’anniversaire des 25 ans de sa création. Au travers de portraits et d’interviewes de quelques-uns des protagonistes de l’époque, moyennant aussi l’évocation de vieux souvenirs et d’anecdotes plus ou moins croustillantes, nous tenterons de retracer les péripéties qui ont jalonné le quart de siècle d’existence de notre club. Porté sur les fonts baptismaux lors d’une assemblée constitutive qui s’est tenue le 20 avril 2001, le club est le fruit d’une alliance de raison entre le FC Tavannes et le FC Tramelan, sociétés alors autonomes et presque centenaires (fondation en 1904 pour le premier nommé, en 1908 pour le second).
A tout seigneur, tout honneur: nous ouvrons les feux de cette série en compagnie de l’initiateur du projet, notre président d’honneur Michel Bourqui. Pendant une très large partie de sa vie, ce Tramelot de 81 ans émigré depuis peu à Courrendlin s’est voué corps et âme au service de la jeunesse et d’un certain idéal sportif. En premier lieu, il a laissé une trace notable dans un club cycliste chaux-de-fonnier (encore aujourd’hui, il est un féru de la petite reine). Puis il en a fait de même au sein du HC Tramelan (15 ans de comité, dont 11 à la présidence) et enfin au FC Tramelan, devenu le FCTT (16 ans de présidence, de 1999 à 2015).
Ce dévouement pour la cause commune a quelque chose d’irréel. Qui accepterait aujourd’hui de se lancer dans un tel sacerdoce? Cet engagement paraît d’autant plus extraordinaire que ce stakhanoviste menait en parallèle une existence déjà trépidante. En plus de sa vie familiale (il a deux filles) et de l’exercice de son métier de galvanoplaste et de chef d’atelier chez Tradhor SA, il officiait de manière très active comme correspondant local pour le compte du «Journal du Jura» et du «Progrès».
«Sûr de mon coup»
«Au terme de mon engagement au HC Tramelan, marqué notamment par la construction de la patinoire couverte et l’accession de l’équipe fanion à la 1re ligue, je me suis accordé une pause sabbatique. J’éprouvais le besoin de souffler un peu», raconte Michel. «Mais cette inactivité n’a pas duré longtemps. ‹Kiki› Glauser est venu me solliciter pour reprendre la présidence du club de foot, pour lui donner une nouvelle impulsion. Devant son insistance, j’ai fini par craquer…»
A cette époque-là, tant Tramelan que Tavannes militaient avec un certain panache en 3e ligue, mais sans grand espoir de gravir un jour un échelon dans la hiérarchie. «A Tramelan par exemple», poursuit Michel, «il aurait fallu engager quatre bons mercenaires, et bien sûr les rémunérer, pour prétendre monter en 2e ligue. Mais c’était une solution à la fois artificielle et contraire à nos principes. Du coup, l’idée d’une fusion avec Tavannes et ainsi d’un rassemblement des forces vives des deux camps a fait irruption dans mon esprit, pour s’y incruster et se transformer bientôt en évidence.»
Michel ne craignait pas les réticences, il était prêt à les affronter crânement. A ses yeux, cette fusion coulait de source. «Au début, à Tramelan, on s’est un peu moqué de moi. Mais j’étais sûr de mon coup. Car le partenariat que nous avions mis en place une dizaine d’années plus tôt pour les juniors de Tavannes, Tramelan et Reconvilier fonctionnait à merveille. Les gamins de l’époque ne s’offusquaient nullement de butiner d’un site à l’autre pour assouvir leur passion du foot, ils trouvaient ça tout naturel. L’esprit de clocher qui pouvait régner dans les villages n’agissait pas comme un frein», dit-il.
Au terme d’un derby – tendu bien sûr, comme tous les autres – entre Tramelan et Tavannes, Michel a pris son homologue tavannois Marcel Greder par la main et l’a entraîné au «Glatz», pour lui faire part de ses intentions. Complices, les deux sont vite tombés d’accord.
Une seule abstention
Dès lors, le train s’est mis en marche. «A Tramelan, il ne m’a pas été particulièrement difficile de convaincre mes collègues du comité d’entreprendre les premières démarches en vue de cette fusion. Finalement, elle apparaissait comme le seul moyen de nous attacher les services des meilleurs joueurs tavannois. On s’est alors donné deux mois pour convoquer une assemblée extraordinaire. Pour ma part, je me suis présenté devant la plupart des équipes tramelotes pour expliquer les enjeux. Dans l’ensemble, on m’a réservé un accueil assez favorable.»
Lors de ladite assemblée extraordinaire tramelote, qui s’est tenue le même soir que celle de Tavannes, le projet de fusion a facilement passé la rampe. Il a été accepté par une septantaine de voix contre zéro, et une seule abstention. A Tavannes, en revanche, les choses ont été beaucoup plus compliquées. Nous y reviendrons ultérieurement en compagnie du président de l’époque Marcel Greder…
Le niet de l’AJF
Une fois acquis l’assentiment des membres tramelots et tavannois, il a fallu préparer une assemblée constitutive, laquelle s’est tenue à la Salle de la paroisse catholique de Tavannes. «Par souci d’équité, il a été décidé d’utiliser les deux sites en alternance, pour les matches comme pour les entraînements», rappelle Michel. «A Orange, au début, il y a eu quelques frictions avec Olympia Tavannes, l’autre locataire des lieux (réd: club aujourd’hui disparu), resté indépendant. Mais, dans l’ensemble, cela a bien fonctionné. Financièrement, nous avons opté pour la création d’un pot commun, dans lequel chaque club a versé la totalité de sa fortune.»
On notera au passage que, pour la 1re équipe du FCTT, cette alternance s’est prolongée très longtemps, soit jusqu’au moment où les installations de Tavannes ont été déclarées incompatibles, par la Ligue amateur, avec les normes de la 2e ligue inter. A partir de là, les matches à domicile se sont joués à Tramelan.
Curieusement, le FC Reconvilier, sollicité, n’a pas souhaité se joindre à l’aventure. Il s’était déjà retiré du partenariat juniors évoqué plus haut. «Quant à l’Association jurassienne, elle s’est d’abord opposée à la fusion», ajoute Michel. «Elle voyait d’un mauvais œil la disparition d’un des deux clubs. Mais en prononçant ce niet, elle avait outrepassé ses droits. L’Association suisse s’est vite chargée de la remettre à l’ordre et de lui ordonner de faire machine arrière.»
Trois ans pour monter
Ses premiers pas, le FCTT les a accomplis en 3e ligue. «Nous avions choisi de donner leur chance aux deux entraîneurs déjà en place, le Tavannois Alain Rohrbach et le Tramelot Philippe Burri, ce dernier dans le rôle d’assistant», poursuit Michel. «Mais nous n’avons atteint notre objectif prioritaire, la promotion en 2e ligue, que lors de la troisième saison.» Le 29 mai 2004, l’équipe, alors entraînée par le regretté Rudi Schribertschnig, cimentait son ascension en s’imposant 1-0 à Montsevelier.
Aujourd’hui, Michel se félicite d’avoir servi de détonateur à cette fusion. «Le bilan global est extrêmement positif», estime-t-il. «Mon entente avec le vice-président Marcel Greder s’est avérée tout aussi fructueuse. Il était mon alter ego et un allié précieux. Il a abattu un boulot inimaginable. Nous n’avons jamais eu le moindre tiraillement.»
Michel a rendu son tablier en 2015, en même temps que tout son comité, et cédé le témoin à Loïc Châtelain et sa garde rapprochée, qu’il «harcelait depuis un bon moment», avoue-t-il dans un large sourire. «Pour moi, il était temps de passer la main et de laisser à des forces juvéniles le soin d’amener une dynamique nouvelle.»